Le chouchen

Bretagne

Aucun commentaire Catégorie : Spiritueux

Description

Autres appellations : chupere, chupenn, chupitez, piketez, pikenaodenn, bochad, chemillard ou chamillard (en pays gallo).

Le chouchen1 (ou chouchenn) n’est autre que la version bretonne de l’hydromel, boisson liquoreuse obtenue à partir de la fermentation du miel dans de l’eau. En Bretagne, cette fermentation est déclenchée par l’introduction de jus de pommes fraîchement pressées. Lorsque le chouchen est fait à base de miel et de cidre, on l’appelle « chufere » (« chug ferv » signifiant liqueur forte).

Un litre de chouchen nécessite environ le tiers de son volume en miel pour atteindre un degré alcoolique suffisant (de 12° à 15°). On le qualifie de « sec » lorsqu’il contient 20 à 30 grammes de sucre et de « liquoreux » quand il en contient 40 à 60 grammes. Le type de miel utilisé joue un rôle déterminant, car il influe sur le goût et la couleur (de jaune pâle à brun) du breuvage. Les miels de printemps (pommier, pissenlit) et d’été (framboisier, trèfle, fleurs sauvages) sont les plus utilisés. Jadis, on utilisait surtout du miel de sarrasin.
Une fois embouteillé, on préconise de laisser vieillir le chouchen une année au minimum. Celui-ci se déguste frais (sans glace), en apéritif ou en digestif. Accordé à de la vodka, il constitue un délicieux cocktail. Au cours du repas, il peut accompagner le melon, un foie gras, des fruits de mer, du gibier, ou un dessert. Les chefs bretons utilisent le chouchen dans certains plats : moules, soles braisées, magret de canard, terrine de cerf, rillettes de sanglier, pâté de pommes, ou encore crêpe fourrée, crème brûlée.

L’hydromel, l’un des alcools les plus anciens de l’humanité, était fort prisé chez les peuples de l’Antiquité. Les Grecs l’appelaient mélicraton et le considéraient comme un nectar des dieux. Mulsa pour les Romains, ces derniers lui prêtaient des vertus aphrodisiaques. Pour les Celtes, cette boisson était celle des dieux, par opposition à la bière, boisson des guerriers. Le chouchen était aussi la boisson des elfes et des druides gaulois.
Au cours des siècles, la méthode de fabrication de l’hydromel a évolué. En Bretagne, où le miel abonde et où la petite cité cornouaillaise de Rosporden s’est spécialisée dans sa fabrication, on buvait un chouchen titrant à près de 20° d’alcool. Quelques verres de chouchen pouvaient occasionner une paralysie de la partie du cerveau gérant l’équilibre, provoquant une chute en arrière. Le phénomène peut s’expliquer par le mode d’extraction du miel que l’on pratiquait. L’essaim d’abeilles, élevées dans des ruches en paille, était étouffé (fumée ou mèche de soufre), puis le miel récolté par pressage et égouttage à froid, suivi d’une chauffe de la cire et des opercules. La solution comprenait du miel, mais aussi du venin provenant des abeilles mortes.

1 Chapeautant tous les hydromels bretons, le mot chouchen, existe depuis 1911, date du brevet déposé par un apiculteur soucieux de se différencier de la concurrence.

Auteur F. Zégierman, relecture Keldélice.

A propos du membre

Frédéric Zégierman Valence (26000)

Frédéric Zégierman a consacré sa vie à sillonner l'Hexagone pour aller chercher sur le terrain sa propre vision géo-ethnographique. Il est l'auteur de livres, de dossiers et d'articles pour magazines. Il réalise également des circuits atypiques pour les autocaristes. Le Guide des Pays de France (volumes Nord et Sud, publiés chez Fayard en 1999) est le premier ouvrage a avoir inventorié, étudié et cartographié l'ensemble de ces unités sous leurs divers aspects.

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Les terroirs de chouchen